mardi 14 mai 2019

Pour que le jour de votre mort soit le plus beau de votre vie

Titre : Pour que le jour de votre mort soit le plus beau de votre vie
Auteur : Lionel Abbo
Édition : Plon
Pages : 220
Note : 3.5 / 5
« Je m'appelle Adolphe Goldstein. Je ne suis pas un simple croque-mort. Je propose à mes clients de choisir le moment et la façon dont ils quitteront ce monde. Une personne décède toutes les cinquante-quatre secondes en France. Mon commerce a de l'avenir. Death planner, c'est mon job. »
Jusqu'à présent, le trépas demeurait un sujet tabou, s'accommodant mal de la liberté du commerce. Mais demain, organiser sa fin sera considéré comme un acte aussi anodin que préparer son mariage. Pourquoi craindre cet instant inéluctable et le subir alors que l'on peut décider du moindre détail ? Choisir sa mort comme on a choisi sa vie.
Porté par cette mission qu'il juge d'utilité publique, jusqu'où ira Adolphe pour convaincre le monde ?


Avis de Cyrlight



Pour que le jour de votre mort soit le plus beau de votre vie est, comme son titre le laisse supposer, un roman décalé et cynique, où le personnage principal, un juif ironiquement prénommé Adolphe, décide de se lancer dans le business de la mort.

Commençons par le point le plus positif de l’histoire : l’écriture. La plume de l’auteur est vraiment excellente, et il n’hésite pas à démontrer son talent en multipliant les jeux de mots ou encore en s’amusant avec les sonorités, sans que cela nuise à la fluidité de la lecture.

Vient ensuite l’originalité. Un personnage croque-mort, ce n’est déjà pas courant, mais un « death planner », alias un homme qui organise des funérailles comme on organiserait un mariage, l’est encore moins. L’incongruité de la chose n’a pas été sans m’évoquer Le magasin des suicides, et c’est d’ailleurs parce que j’avais bien aimé le film d’animation que j’ai été tenté de lire ce livre qui me semblait vaguement dans la même veine.

On a donc Adolphe, qui s’efforce d’organiser des funérailles uniques et personnalisées en fonction des défunts, mais qui, bientôt, ne se cantonnera plus à ce rôle. Pourquoi se contenter d’offrir une belle cérémonie quand on peut permettre aux gens de choisir leur propre mort ?

Plus l’histoire progresse et plus les ambitions d’Adolphe s’accroissent, mais j’ai été moins emballée par ce pan de l’intrigue, qui m’a paru oscillé entre trop et trop peu. Les actes du protagoniste ne tardent pas à prendre une dimension démesurée (envoyer des cendres dans l’espace, louer les services d’un cannibale...), mais je déplore que le roman ne s’attarde pas assez sur chacune des étapes qu’il franchit dans ce que l’on pourrait presque appeler sa mégalomanie funèbre.

Par exemple, j’ai beaucoup aimé l’interrogatoire avec l’inspectrice, où Adolphe parvient avec aisance à retourner la situation, et j’aurais aimé voir davantage à l’œuvre ses talents de « vendeur », au lieu de quoi j’ai eu l’impression que chacune de ses prestations n’étaient illustrées que par quelques exemples, avant de passer directement à la suite. Les funérailles sur mesure, puis les morts sur mesure, puis le jeu télévisé...

Et là, paradoxalement, j’ai trouvé qu’on était dans le trop. Que tout allait souvent beaucoup trop loin. Comment quelqu’un qui souhaite rester discret peut-il autant s’exposer ? Comment privatiser un tribunal et louer les services de figurants pour jouer un faux procès (en étant de surcroît soi-même présent) sans que cela n’intrigue qui que ce soit ?

En ce qui concerne la fin, en revanche, on retombe dans le trop peu. Même si elle semble être un parfait retour de bâton pour Adolphe qui s’est littéralement mis à jouer avec la mort, j’aurais apprécié qu’elle soit plus développée. Au lieu de prendre le temps d’assumer les conséquences de ses actes, il préfère s’y soustraire, si bien qu’on ne sait même pas ce qu’il advient de l’enfant, juste brièvement évoqué.

Malgré ces quelques points négatifs, le roman est plutôt bon dans l’ensemble, et il sait surtout sortir du lot, ne serait-ce que par les thèmes qu’il aborde et les questions qu’il soulève au niveau de la morale. Mention spéciale à Benjamin Raspail qui m’aura bien fait rire.

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